mercredi 11 février 2015

Retour à Death Valley - Eureka Sand Dunes

Il y a plusieurs sites avec des dunes de sables dans la Vallée de la Mort. Lors d'un précédent périple nous avions vu celles qui se trouvent à proximité de Stovepipe Well, qui sans être très hautes, sont surtout intéressantes de par leur situation dans le paysage grandiose environnant. Le champ de dunes d'Eureka s'annonçait beaucoup plus impressionnant, puisqu'en culminant à 230 mètres au dessus du sol, elles seraient les plus hautes d'Amérique du nord.
Arrivée vers les dunes, on voit bien la "tôle ondulée" sur la route
Voir ces dunes se mérite, elles sont situées au fin fond du parc de Death Valley, coincée derrière les "Last Chance Montains" et uniquement accessibles par une piste de 67 km aller simple. Cette fois, nous n'avions pas loué de Jeep, nous y sommes donc allé avec notre Nissan Murano en espérant ne pas crever un pneu en chemin. Après quelques kilomètres, nous avons vu que la piste formait une "tôle ondulée" bien prononcée. Nous avons commencé par prendre ces ondulations au ralenti afin de ne pas tout casser mais nous avons vite réalisé qu'il n'était pas possible de faire les 67 km de cette manière.

Crankshaft Junction
Nous nous sommes heureusement rappelé du film "Le Salaire de la Peur" d'Henri-Georges Clouzot et du fameux passage de la "tôle ondulée", nous avons donc appuyé sur le champignon et comme dans le film, vers 50-60 km/h, la voiture "vole" d'une ondulation à l'autre quasiment sans secousse. Le seul problème est que l'absence de secousse s'accompagne d'une absence d'adhérence des pneus ! Il faut alors être extrêmement vigilant car la piste est régulièrement coupée par des ornières qu'il convient de négocier à l'extrême ralenti, sous peine de tout casser. Patricia faisait la copilote en annonçant les ornières pendant que je tentais de garder le cap. Heureusement sur ces pistes, les autres véhicules se repèrent de très loin grâce aux nuages de poussières qui les accompagnent, cela permet d'utiliser sans risque toute la largeur de la piste. 

Après une vingtaine de kilomètres, la piste bifurque vers la gauche à "Crankshaft Junction", littéralement : "le croisement du vilebrequin", Curieux endroit, effectivement  décoré par de vieux vilebrequins rouillés qui nous rappellent "Teakettle Junction" sur la route de "Racetrack Playa". 

Crater Mine


La piste grimpe ensuite dans la montagne, jusqu'à "Crater Mine", site d'une ancienne mine de soufre qui a dû être abandonnée en l'état, sans chercher à récupérer le matériel. En descendant de la voiture on sent tout de suite l'odeur caractéristique du soufre. Nous explorons un peu les lieux en marchant dans une bonne couche de matière pulvérulente blanche - qui doit être du borax - parsemée de pierres jaunâtres, riches en soufre. Je n'ai pas trouvé beaucoup d'informations sur l'histoire de cette mine. Ce site indique qu'elle aurait été exploitée à plusieurs reprises sur des périodes assez courtes entre 1930 et 1990 et qu'elle aurait même explosée dans les années 1950 ! En visitant ces très nombreuses mines très vites abandonnées, on se dit que bien que le terrain soit certainement très riche en minerais de toutes sortes, les prospecteurs ont dû très vite se heurter à des difficultés pratiques. L'extrême chaleur durant l'été et les difficultés d'acheminement du matériel et du minerais, ne devaient pas être les moindres.

Les dunes d'Eureka
Peu après "Crater Mine", la piste se transforme en route goudronnée, reste certainement de la dernière tentative d'exploitation de la mine. Malheureusement cela ne dure pas et nous retrouvons vite... la tôle ondulée. Les derniers kilomètres sont d'ailleurs assez éprouvants. Mais cela en vaut vraiment la peine car le champ de dunes est magnifique.

Nous garons la voiture et partons faire l'ascension des dunes, il faut faire vite car le soleil est déjà bas sur l'horizon et nous devons refaire les 67 km de piste en sens inverse. Nous ne ferons pas l'ascension complète, mais nous grimpons quand même pas mal, au rythme de trois pas en avant et l'équivalent de deux en arrière quand la pente se fait raide ; c'est épuisant  ! En avançant, nous découvrons une végétation très particulière, il y a en effet plusieurs espèces de plantes endémiques qui se sont adaptées à cet environnement pour le moins hostile à la végétation.

Nous avons eu de la chance, car deux jours plus tôt, le vent soufflant très fort, a certainement effacé les traces de pas des touristes et les dunes sont presque immaculées.

En bas des dunes se trouve un camping avec les emplacements les plus grands et les plus isolés que nous ayons jamais vus. Nous nous disons que ce serait formidable de passer quelques jours et quelques nuits ici à condition bien sûr d'avoir des réserves d'eau suffisantes car il n'y en a pas dans le camping.

Nous rentrons à la nuit tombante, ravis de ce nouveau périple et conscients d'avoir vu quelque chose d'exceptionnel. Ce qui frappe surtout en allant là bas, c'est l'immensité du parc ; on réalise qu'il doit y avoir bien des canyons et bien des vallées cachées, hors de portée de la plupart des visiteurs.






























  • Toutes nos photos d'Eureka Sand Dune sont visibles ici

dimanche 8 février 2015

Retour à Death Valley - Racetrack Playa

Racetrack Playa est cet endroit extraordinaire où des pierres pesant plusieurs dizaines de kilogrammes se déplacent apparemment toutes seules - ou du moins sans intervention humaine - en laissant des traces bien visibles dans le sol. Le site se trouve dans la partie nord du parc de "Death Valley" non loin du camping de Mesquite Spring dans lequel nous avions planté notre tente.

Avant de nous aventurer là bas, nous nous étions renseigné auprès d'un "ranger" du parc afin de connaître l'état de la piste longue de 45 km qu'il fallait emprunter. Son avis fut sans appel : "n'y allez pas avec votre voiture, vous allez la détruire...". Une affiche dans le camping mettait également les gens en garde sur le risque de déchirure des pneus et de destruction de la transmission ! Bref, pas très engageant tout ça... Nous avons donc décidé de ne pas prendre de risques et de louer une Jeep à Furnace Creek qui se trouve à l'autre extrémité du parc. En gros, c'est à peu près comme si en campant à Annecy, on allait louer une voiture à Grenoble afin de visiter Chamonix et le tout dans la journée bien entendu ! Ce n'est pas donné (environ 300$ la journée), mais les gens de cette entreprise familiale sont plutôt sympas, les voitures sont en excellents états et une balise de localisation par satellite est même fournie en cas de problème (je préfère ne pas penser au coût du dépannage quand on déclenche la balise...)

Nous voilà donc au volant de notre belle Jeep Wrangler, en route pour Racetrack Playa. Après 80 km de route, nous attaquons la fameuse piste qui se révèle en fait pas si terrible que cela, nous aurions certainement pu la faire avec notre voiture, mais il est vrai que le fait d'être dans un vrai 4x4 costaud permet de ne pas se poser de question et de parcourir les 45 km de piste en 1h30 environ. Le vrai risque est lié aux bordures de la piste pleines de pierres bien aiguisées qui ne demandent qu'à lacérer les pneus; il faut donc rester loin des bords et faire super attention en se serrant pour croiser les autres véhicules (heureusement assez peu nombreux).


Teakettle Junction
La piste s'enfonce dans la montagne, avec un passage somptueux au milieux de Joshua Trees. On arrive ensuite à Teakettle Junction, c'est à dire littéralement : "le croisement des bouilloires" ! Et en effet, le panneau indicateur en bois est orné de quelques dizaines de bouilloires. Nous ne connaissons pas l'origine de cette tradition, mais c'est en tout cas pour le moins original. Sur l'une des bouilloires, figurait un message demandant aux visiteurs de passage de se prendre en photo devant le panneau et d'envoyer celle-ci à une adresse mail. Nous avons joué le jeu et peu après, nous avons reçu en retour une photo de la part des propriétaires de la bouilloire qui habitent à Saint Pétersbourg. Autre détail amusant sur ce lieu; c'est l'un des seuls endroits du nord de la Vallée de la Mort où le téléphone cellulaire passe, il y a même de la 4G ! Pourquoi ici ? Mystère... Nous avons donc pu en profiter pour envoyer quelques messages aux enfants.

Grandstand depuis le chemin qui mène à Ubehebe Peak
Encore quelques kilomètres et on arrive en vue de Racetrack Playa. La vue est saisissante, la "playa" est le fond d'un lac asséché, parfaitement plat (il n'y a que 4 cm de dénivelé entre les deux extrémités distantes de 4.5 km), de couleur ocre uniforme et avec une île rocheuse nommée "Grandstand" (la tribune) qui se dresse comme une sorte de vaisseau figé dans la boue. Le paysage évoquait le film "Dune" à Patricia. On a effectivement l'impression d'être dans un décor de science-fiction. Lorsqu'elle est sèche, on peut marcher sur la Playa et grimper entre les rochers de Grandstand. Quelques idiots n'ont pu s'empêcher de laisser des traces en marchant alors que la boue n'était pas sèche, c'est dommage car par ailleurs, le sol est immaculé, sans une seule trace de végétation, on ne distingue que les motifs géométriques formés par la boue séchée.

Vers Grandstand, c'est à dire au nord de la Playa, il n'y a pas de traces visibles de pierres qui bougent, il faut reprendre la Jeep afin de rejoindre la partie sud.

Celui-ci doit bien faire dans les 30-40 kg
L’œil est tout de suite attiré par ces grosses pierres isolées sur la Playa dont on se demande comment elles ont pu arriver là. En s'approchant on constate qu'elles ont laissé une traces bien marquée dans la boue. Certaines ont visiblement changé de direction, parfois la trace forme un angle à 90 degrés. Certaines pierre se déplacent de conserve comme en témoignent les traces parallèles, d'autres se croisent... c'est très étonnant à voir et on se demande bien quel mécanisme peut mettre en mouvement des rochers aussi lourds et souvent bien calés dans le sol.

L'un des éboulis qui alimentent la Playa en pierres
Le plus étonnant est peu-être que ce phénomène, bien que connu depuis fort longtemps, n'a été clairement photographié et mesuré que lors de l'hiver 2013-2014. Des pierres préalablement équipées de puces GPS et filmées se sont mises en mouvement quand toutes les conditions météo (température, humidité et vent) ont été réunies, permettant ainsi d'analyser le phénomène. Si je comprends, bien c'est la poussée de fines plaques de glace qui provoque le déplacement des pierres sous l'effet du vent et alors que la Playa inondée et gelée commence à fondre. Quand les conditions sont bonnes, une légère brise suffit pour mettre les pierres en mouvement. Les pierres elles-mêmes proviennent de quelques éboulis situés au sud de la Playa.

Avant de reprendre la piste en sens inverse, nous avons emprunté le sentier qui monte vers Ubehebe (prononcer you-bi-hi-bi) Peak afin d'admirer le site dans son ensemble. Sur le chemin du retour nous avons encore fait une courte randonnée vers les anciennes mines de plomb de Ubehebe avant de devoir à regret, reprendre la Jeep à la nuit tombante.

Racetrack Playa au soleil couchant
  • Toutes nos photos de Racetrack playa sont visible ici
  • L'article publié dans PLOS ONE sur le déplacement des pierres peut-être consulté ici