samedi 5 décembre 2015

Death Valley - Encore une fois...

À chaque fois que nous sommes allés à Death Valley, nous en sommes revenus enchantés et avec une envie encore plus grande d'y retourner. Ce parc est immense et comprend en fait plusieurs vallées séparées par des massifs montagneux. En préparant nos visites, nous nous sommes rendu compte que la plupart des sites intéressants ne sont pas répertoriés dans la documentation officielle du parc et qu'il faut vraiment passer du temps sur le Web pour découvrir les merveilles qu'il recèle. Cet état de fait est voulu pour probablement tenter d'éviter que des imprudents s'aventurent trop loin des sentiers balisés et risquent leur vie lorsque la chaleur est suffocante et l'humidité quasi nulle, mais c'est aussi une manière de protéger les sites et notamment les vestiges préhistoriques indiens.

Désert, vestiges, indiens, "trésors" cachés, voilà qui ne pouvait qu'aiguiser notre curiosité et nous inciter à creuser l'affaire...


Les pétroglyphes représentant des femmes enceintes à Saline Valley
Lors de précédentes recherches sur les pétroglyphes indiens, nous avions découvert les livres et le site Web de Death Valley Jim, personnage intéressant et haut en couleur qui court les déserts de l'ouest américain depuis des années et revendique de n'être jamais allé plus au nord que Bishop car "il y a vraiment trop d'arbres là-bas !" Jim a écrit plusieurs livres sur les sites qu'il a visités et parfois même découverts ; ces ouvrages sont très mal vus par les services du parc car ils donnent des indications trop précises sur les lieux décrits. Constatant que cette personne était une vraie mine de connaissances, nous sommes vite devenus des fans inconditionnels de Jim : livres, page Facebook, site web, podcasts, ... avec le rêve de l'engager comme guide pour une nouvelle virée dans le désert. L'occasion s'est finalement présentée le mois dernier. 


Le bat-totem qui signale l'arrivée aux sources
Patricia et moi avions été fascinés par un article de Jim sur des pétroglyphes représentant des femmes enceintes et des condors. Avec les indications figurant dans celui-ci et l'aide de Google Earth, nous étions quasiment certains d'avoir localisé les fameuses falaises blanches servant de support aux gravures, mais celles-ci se situaient dans une zone accessible uniquement en 4x4, donc hors de portée de notre Nissan. L'étude des images dans Google Earth nous a révélé que pas loin du site se trouvaient des sources chaudes et un camping accessibles avec notre véhicule. Rendez-vous fut donc pris avec Jim pour une visite sur deux jours. Nous avions précisé que nous voulions voir les pétroglyphes mais lui avions laissé carte blanche pour organiser le restant du temps.

L'accès aux sources chaudes se fait via une piste de 80 km et il faut bien compter un minimum de trois heures pour la parcourir. Après une dizaine de km nous sommes tombés sur un couple de touristes attendant près d'un véhicule avec un pneu en lambeaux. Leur voiture de location était dépourvu de cric ! C'est le genre de mésaventures banales qui peut tourner au tragique en plein été si l'on n'a pas suffisamment d'eau (les touristes en question n'avaient visiblement que quelques canettes d'Ice Tea). De notre côté, nous partons toujours avec une roue de secours en plus de la roue "galette" standard, plus une bombe anti-crevaison.
L'un des bassins alimentés par la source Palm Spring

Après les kilomètres de piste au milieu de désert, on contourne "Salt Lake", puis il faut prendre à droite une nouvelle piste improbable, juste signalée par un morceau de chenille de tank. On traverse alors la vallée jusqu'à un curieux totem orné de chauve-souris qui signale l'arrivée aux "Lower Hot Springs", véritable oasis avec palmiers et pelouse. Un peu plus haut, nous atteignons notre destination aux "Middle Springs". Ces sources sont une curiosité ; elles ont été aménagées dans les années 60 par quelques hippies et sont maintenant toujours entretenues par une communauté de bénévoles, plus où moins tolérée par le Parc National de Death Valley. On y trouve des bassins, des baignoires, des douches, ainsi que les toilettes sèches les plus propres que nous ayons jamais vues ou plutôt senties ! Les habitués des sources se baignent généralement tout nus, mais le maillot de bain ne pose pas de problème... Et franchement, quel délice de faire trempette dans cette eau à 38-40 degrés, la tête sous les étoiles, après une journée de randonnée ou de "secouage" en Jeep !

Nous sommes arrivés en même temps que Jim, un peu avant la tombée de la nuit. L'installation fut compliquée par un vent très fort et plutôt froid qui nous a empêchés de monter la grande tente. Le vent dans le désert est particulièrement pénible car la poussière de sable s'insinue partout et recouvre tout.
Patricia devant les "Upper Hot Springs"
Le lendemain matin, nous partons en Jeep avec Jim en direction des "White Cliffs" et nous constatons très vite que l'accès aurait été impossible avec notre voiture. Nous faisons une halte aux "Upper Hot Springs" qui ne sont pas aménagées et se présentent donc comme une oasis naturelle, malheureusement un peu gâchées par un horrible grillage sensé les protéger des ânes sauvages. Après encore quelques kilomètres en Jeep, nous nous arrêtons et nous nous dirigeons à pied vers des falaises blanches. Petite satisfaction personnelle ; elles se trouvent bien à l'endroit que nous avions localisé sur Google Earth. Nous rentrons dans le canyon et Jim nous montre les pétroglyphes représentant des femmes enceintes avec un ventre tout rond et un nombril bien creusé. Nous sommes ravis ! Jim précise qu'il ne connait qu'un seul autre site avec ce genre de représentations et qu'il se trouve également dans des falaises blanches ; est-ce une coïncidence ? Qu'elle est la signification des gravures ? Sanctuaire dédié à la fertilité ? Maternité ? Beaucoup de questions et pas de réponses ; juste le plaisir d'imaginer ce peuple gravant la pierre il y a peut-être des milliers d'années. Nous sommes d'ailleurs étonnés de constater à quel point il y a peu d'informations, comme si les archéologues étaient démunis face à ces sites.


Les condors
Un tout petit peu plus loin dans le canyon, Jim nous montre une grande fresque avec des condors dont les poitrails ont été piquetés. Ces représentations  sont étonnantes puisqu'il n'y a actuellement plus de condors dans cette région. Mais, pour avoir eu la chance d'observer un condor californien au Grand Canyon, nous pouvons facilement imaginer que cet oiseau majestueux  ait pu marquer l'esprit des artistes indiens.

A proximité de la fresque, un cercle de pierres adossé à la falaise est certainement un vestige du peuple qui a gravé les pétroglyphes il y a quelques siècles. Et puis partout, des éclats d'obsidienne sont aussi les témoins de l'activité humaines passée. Quand on pense que ce matériau n'existe pas dans la région, on se prend à imaginer les échanges qui ont dû avoir lieu entre les peuples au gré des migrations et des explorations. Ces morceaux d'obsidienne devait représenter un trésor fabuleux pour les gens de Saline Valley, contre quoi les échangeaient-ils ?
Cercle de pierre dans "Hunter Canyon"
L'après-midi, Jim nous emmène de l'autre côté de la vallée à "Hunter Canyon". Nous sommes d'abord surpris de voir de l'eau, pas mal d'eau... et Jim nous précise que les sources coulent toute l'année. Ce n'est donc pas si étonnant de trouver les restes d'un village indien. Oh, on peut facilement passer sans les voir, mais quand on nous montre les cercles de pierres, les meules, les pétroglyphes et les tombes, alors tout devient clair. Des centaines d'indiens ont vécu ici, les derniers ont parait-il coexisté avec les mineurs jusque dans les années 50. 


Des pétroglyphes plutôt abstraits
Jim nous explique que les cercles de pierres sont les fondations sur lesquelles s'appuyaient des assemblages de bois qui formaient les tipis. Jim connait l'endroit comme sa poche, il nous emmène d'un site à un autre en nous décodant les traces du passé. À un moment, il y a tellement de pétroglyphes autour de nous qu'il est difficile de ne pas marcher dessus. Nous voulions en voir, nous voilà servi... Les tombes sont particulièrement émouvantes, des centaines de gens ont été enterrés ici ; combien de deuils, combien de drames ? Mais on se dit aussi qu'il devait faire bon vivre quand le climat était moins chaud, que le lac était plein et que les sources coulaient au milieu des champs et que les "bighorns" étaient abondants.

En fin d'après-midi, nous rejoignons notre campement ; réparation et montage de la grande tente puisque le vent est tombé, et... trempette dans les sources chaudes, un véritable délice ! Nous ne savons pas exactement ce que Jim nous réserve pour le lendemain, il nous parle juste de pictographes.
Les pictographes de "Hidden Valley"
Nous repartons le matin, direction le "South Pass" par lequel nous sommes arrivés l'avant veille. Nous nous arrêtons pour observer quelques pétroglyphes que Jim nous avoue avoir découvert en allant faire pipi, puis nous rejoignons "Hidden Valley", Patricia en saute presque de joie. C'est l'un des endroit les plus isolés du parc, nous en rêvions, mais nous pensions ne jamais avoir l'occasion d'y aller. La route est éprouvante et nous sommes secoués dans tous les sens, puis finalement Jim arrête la Jeep et nous emmène au milieu des buissons de créosote (larrea tridentata), des cactus et des Joshua Trees. 
Un bighorn bien discret se cache sur ce rocher...

Finalement, il contourne un massif rocheux et nous désigne une petite grotte dons les parois sont couvertes de dessins réalisés avec un pigment rouge, parait-il fabriqué à partir d'argile et d'urine. Les motifs sont surtout des grandes lignes plus ou moins parallèles qui me font un peut penser aux gravures de condor vues la veille. On trouve aussi  des ovales striés évoquant des empreintes de mocassins (?). Jim nous dit avoir trouvé des branches de sauges brûlées qui lui font penser que l'endroit est encore fréquenté aujourd'hui pour des cérémonies traditionnelles. Nous observons les alentours et Patricia repère un splendide pétroglyphe représentant un bighorn que Jim, n'avait jamais vu. Mathilde, de son côté, trouve plein de morceaux d'obsidienne.


Racetrack playa
Pour le retour, Jim nous propose d'emprunter une autre route via Teakettle junction et Racetrack Playa, l'endroit où les pierres bougent toutes seules. Nous avions visité ces sites lors de notre dernier périple, mais nous sommes ravis de les revoir et de les faire découvrir à Mathilde. Nous rejoignons ensuite Saline Valley par la fameuse Lippincott road, réputée être particulièrement dangereuse. En fait, la piste est vertigineuse mais bien moins mauvaise que ce que nous pensions.


Beveridge cabin
Jim a encore un site qu'il veut nous faire découvrir, il s'agit de "Beveridge canyon" ; pas de pétroglyphes ici, mais une maison de mineurs abandonnée en l'état et des cascades. La maison est incroyable, tout le matériel a été laissé sur place, la porte est ouverte et les visiteurs laissent juste un mot dans un registre pour indiquer qu'ils sont passés. Jim nous explique que durant la deuxième guerre mondiale tout le pays s'est recentré sur l'essentiel et beaucoup de mines de Death Valley ont été abandonnées du jour au lendemain. Ce fut un peu un choc pour moi de prendre conscience de cette réalité, l'école m'avait un peu fait croire que les américains avaient débarqués "comme ça" en Normandie sans préparation et presque sans efforts de la part de la population restée sur place. En regardant cette maison à l'entrée du canyon, on imagine la tristesse de ces gens qui avaient mis tout leurs espoirs dans l'exploitation minière au cœur d'un endroit magnifique et qui ont dû tout quitter. 
La deuxième cascade de Beveridge canyon

En crapahutant dans les rochers, nous atteignons finalement la première puis la deuxième cascade. Jim nous dit qu'il y en a quatre, mais nous n'avons pas le temps et probablement pas la dextérité nécessaire pour rejoindre les deux autres. 

Au delà des cascades, il y a aussi la ville fantôme de Beveridge, accessible uniquement pour les plus téméraires après deux jours de marche difficile. Nous y pensons sérieusement pour une prochaine fois... Mais pour l'instant nous retournons simplement au campement pour un bain dans les sources chaudes. 

C'est probablement la plus belle visite que nous ayons faite dans Death Valley. 


Notre campement à Palm Spring 

samedi 8 août 2015

Mission Creek - Les maisons flottantes de San Francisco

Si vous demandez à une habitante de San Francisco où se trouvent les maisons flottantes ? Il y a de grandes chances qu'elle vous envoie à Sausalito, de l'autre côté du Golden Gate Bridge. Et pourtant, il y a bien des maisons flottantes à San Francisco même. Je les ai découvertes par hasard en me perdant en voiture dans les quartiers à l'est de la ville, vers China Basin et le stade AT&T. Tout ce quartier est en pleine réfection, et abandonne ses ruines industrielles pour de très chics immeubles. 

Au milieu des travaux, coincé entre les immeubles et l'autoroute, se trouve une rivière canalisée nommée "Mission Creek" et bordée de maisons-bateaux multicolores. Mission Creek reçoit les eaux de plusieurs rivières naturelles aujourd'hui canalisées et était déjà habitée par les indiens Ramaytush (signifiant : "le peuple de l'autre côté de la mer"), bien avant l'arrivée des colons.

Dans les années 60, Mission Creek était habitée par quelques vieux marins "rugueux" et ne voulant surtout ne rien n'avoir à faire avec le restant de la ville. La rivière était alors un égout à ciel ouvert qui fut par la suite assaini grâce à l'installation d'un système de traitement des eaux usées. La population changea en gardant toutefois un côté un peu marginal et en décalage par rapport aux "hipsters" ou "bobos branchés" de San Francisco. Il est difficile de trouver des informations sur ces bateaux flottants, mais il semble bien que leur préservation fut le résultat d’âpres combats, dont deux femmes furent les héroïnes : Ruth Huffaker et Betty Boatright (nom prédestiné ?).

Quand nous y sommes allés il y a quelques semaines, nous avons eu la surprise de tomber au moment d'une fête de quartier haute en couleur. Curieusement j'ai eu l'impression de n'être que toléré en ces lieux, la fête étant visiblement  organisée par les habitants pour les habitants. Oh, pas d'animosité, juste l'impression d'être transparent... Chance, le portail du jardin communautaire était ouvert et nous avons pu y jeter un coup d’œil ; très beau, paisible et juste superbement décalé par rapport à la frénésie de la ville. Nous avons bien essayé de lancer la conversation avec la personne tenant la buvette, mais sans grand succès, nous avons juste su qu'elle habitait la maison-bateau juste derrière.
Ceci contraste beaucoup avec la nature habituelle des californiens qui aiment discuter et raconter ce qu'ils font. Les gens là bas seraient-ils des extra-terrestres comme le laisserait supposer ce bateau en forme de soucoupe volante ornée de multiples ampoules colorées? Ou bien sont-ils simplement des fans d'OSS 117 et de son pédalo canard

Dans tous les cas le lieu vaut le détour et nous y retournerons. Qui sait, peut-être saurons nous finalement apprivoiser ces gens étonnants qui aspirent certainement à vivre tranquillement et souhaitent préserver une certaine façon de vivre ?

samedi 1 août 2015

Point Reyes

Point Reyes est une péninsule située à une cinquantaine de kilomètres au nord de San Francisco qui offre des paysages uniques sur la côte californienne. C'est également une réserve de faune sauvage importante et variée. Nous avons beau connaitre Point Reyes depuis des années, cela reste l'une de nos destinations favorites autour de San Francisco. Lors du présent séjour, nous avons entrepris une exploration quasi systématique des sentiers de randonnées.

Quand on arrive vers San Francisco en avion par le nord et que le brouillard n'est pas au rendez-vous, la pointe de Point Reyes se repère tout de suite par sa forme bien particulière. Et pour cause, il s'agit d'un morceau de terre qui appartient à la plaque pacifique et qui coulisse vers le nord le long de la faille de San Andreas. En regardant une carte, on voit que la "ligne de découpe" qui correspond à la faille est évidente. D'ailleurs l'épicentre du grand tremblement de terre de 1906 se trouvait au niveau du village de Olema et un sentier dit "du tremblement de terre" au "visitor center" de Point Reyes explique en détail les mouvements tectoniques de la région.


La datcha à Inverness 
Pour aller de San Francisco à Point Reyes on emprunte la route côtière numéro 1 avec ses nombreux virages et qui offre un spectacle grandiose sur la côte pacifique. On quitte la côte au niveau de la petite station balnéaire de Stinson Beach, l'une des rares plages autour de San Francisco où l'eau se réchauffe suffisamment pour permettre une courte baignade dans l'océan.  On rentre dans les terres en longeant le lagon de Bolinas qui abrite de nombreux oiseaux et mammifères marins. Le lagon est lui même situé sur la faille et marque l'entrée de la péninsule de Point Reyes.
Plus loin, le "Sir Francis Drake boulevard" traverse les villages d'Inverness Station et d'Inverness avec leurs maisons de style est-européen; Andrew Romanoff, descendant du dernier tsar de Russie, vit d'ailleurs toujours là-bas. Une splendide datcha sur pilotis et le décor typique du restaurant tchèque Vladimir's, contrastent avec les ranchs que l'on trouve un peu plus loin sur la péninsule. Ceux-ci sont identifiées par une lettre de l'alphabet correspondant à une division géographique des lieux. Quand on voit la localisation de ces ranchs aujourd'hui (dont certains sont encore en exploitation) on ne peut s'empêcher de penser aux pionniers qui sont venus s'installer ici, ils ne pouvaient vraiment pas aller plus loin à l'ouest !


Jour de brouillard au phare
Point Reyes c'est bien sûr son phare à l'extrême pointe ouest de la péninsule, auquel on accède en descendant plus de 300 marches ! Le phare est en-effet construit en contrebas de la falaise de façon à être situé sous le niveau habituel du brouillard. À l'intérieur, une monumentale lentille de Fresnel construite à Paris en 1867 et un petit musée qui décrit les conditions de vie très difficiles des gardiens de phares qui devaient faire face à des tempêtes dantesques. Curieusement cette pointe de Point Reyes est un endroit où le climat est extrême de par le brouillard et le vent mais où il pleut très peu. Un vaste système de récupération des eaux de pluie est visible en haut des marches qui descendent au phare, il fallait en effet pas mal d'eau pour alimenter la machine à vapeur actionnant la corne de brume. Le vent peut souffler si fort et si longtemps que certains gardiens sont parait-il devenus fous !


Alamere Falls
De nombreux sentiers de randonnées sillonnent Point Reyes. L'un d'entre eux part un peu au nord de Bolinas et permet de rejoindre les cascades d'Alamere. Superbe balade à faire à la fin de l'hiver lorsque les ruisseaux sont gorgés d'eau. La dernière cascade tombe directement sur la plage, c'est de toute beauté.

Bien d'autres chemins permettent d'explorer les baies (Limantour, Drake ...) dont certaines sont refermées par un cordon lagunaire. Cette configuration offre refuge et nourriture à toute une faune. Il n'est pas rare d'être épié par quelques phoques curieux ou de voir des raies chasser à quelques mètres du rivage.

La baie la plus encaissée dans les terres est celle de Tomales qui remonte le long de la faille de San Andreas, la randonnée pour se rendre à son extrémité (Tomales Point) est assez longue (20 km aller et retour) mais vaut vraiment l'effort; la pointe est battue par les vagues et de nombreuses espèces d'oiseaux y sont présentes. Le long du chemin nous avons croisé plusieurs troupeaux de cerfs de Tulé (Tule Elk), ce sont de grands cerfs au pelage très clair qui ont faillit disparaître avec l'arrivée des premiers colons qui trouvaient en eux des cibles faciles et nourrissantes. Il parait que les cerfs de Tulé actuels sont les descendants d'une petite dizaine de rescapés.


Tule Elk
Point culminant de Point Reyes, le Mont Vision offre une vue à 360 degrés qui montre à quel point la mer et les terres se mélangent à Point Reyes. En redescendant du Mont Vision vers la baie de Tomales, on peut s'arrêter sur l'une des plages qui bordent la baie, l'eau réchauffée par le soleil y est agréable et si l'on aperçoit quelques ailerons, il s'agit sans doute de requins léopards, sans danger pour l'homme (mais un peu flippant quand même...).

Nous ne nous lassons pas de Point Reyes et je crois que nous y retournerons encore quelques fois...
Tomales Point

mercredi 11 février 2015

Retour à Death Valley - Eureka Sand Dunes

Il y a plusieurs sites avec des dunes de sables dans la Vallée de la Mort. Lors d'un précédent périple nous avions vu celles qui se trouvent à proximité de Stovepipe Well, qui sans être très hautes, sont surtout intéressantes de par leur situation dans le paysage grandiose environnant. Le champ de dunes d'Eureka s'annonçait beaucoup plus impressionnant, puisqu'en culminant à 230 mètres au dessus du sol, elles seraient les plus hautes d'Amérique du nord.
Arrivée vers les dunes, on voit bien la "tôle ondulée" sur la route
Voir ces dunes se mérite, elles sont situées au fin fond du parc de Death Valley, coincée derrière les "Last Chance Montains" et uniquement accessibles par une piste de 67 km aller simple. Cette fois, nous n'avions pas loué de Jeep, nous y sommes donc allé avec notre Nissan Murano en espérant ne pas crever un pneu en chemin. Après quelques kilomètres, nous avons vu que la piste formait une "tôle ondulée" bien prononcée. Nous avons commencé par prendre ces ondulations au ralenti afin de ne pas tout casser mais nous avons vite réalisé qu'il n'était pas possible de faire les 67 km de cette manière.

Crankshaft Junction
Nous nous sommes heureusement rappelé du film "Le Salaire de la Peur" d'Henri-Georges Clouzot et du fameux passage de la "tôle ondulée", nous avons donc appuyé sur le champignon et comme dans le film, vers 50-60 km/h, la voiture "vole" d'une ondulation à l'autre quasiment sans secousse. Le seul problème est que l'absence de secousse s'accompagne d'une absence d'adhérence des pneus ! Il faut alors être extrêmement vigilant car la piste est régulièrement coupée par des ornières qu'il convient de négocier à l'extrême ralenti, sous peine de tout casser. Patricia faisait la copilote en annonçant les ornières pendant que je tentais de garder le cap. Heureusement sur ces pistes, les autres véhicules se repèrent de très loin grâce aux nuages de poussières qui les accompagnent, cela permet d'utiliser sans risque toute la largeur de la piste. 

Après une vingtaine de kilomètres, la piste bifurque vers la gauche à "Crankshaft Junction", littéralement : "le croisement du vilebrequin", Curieux endroit, effectivement  décoré par de vieux vilebrequins rouillés qui nous rappellent "Teakettle Junction" sur la route de "Racetrack Playa". 

Crater Mine


La piste grimpe ensuite dans la montagne, jusqu'à "Crater Mine", site d'une ancienne mine de soufre qui a dû être abandonnée en l'état, sans chercher à récupérer le matériel. En descendant de la voiture on sent tout de suite l'odeur caractéristique du soufre. Nous explorons un peu les lieux en marchant dans une bonne couche de matière pulvérulente blanche - qui doit être du borax - parsemée de pierres jaunâtres, riches en soufre. Je n'ai pas trouvé beaucoup d'informations sur l'histoire de cette mine. Ce site indique qu'elle aurait été exploitée à plusieurs reprises sur des périodes assez courtes entre 1930 et 1990 et qu'elle aurait même explosée dans les années 1950 ! En visitant ces très nombreuses mines très vites abandonnées, on se dit que bien que le terrain soit certainement très riche en minerais de toutes sortes, les prospecteurs ont dû très vite se heurter à des difficultés pratiques. L'extrême chaleur durant l'été et les difficultés d'acheminement du matériel et du minerais, ne devaient pas être les moindres.

Les dunes d'Eureka
Peu après "Crater Mine", la piste se transforme en route goudronnée, reste certainement de la dernière tentative d'exploitation de la mine. Malheureusement cela ne dure pas et nous retrouvons vite... la tôle ondulée. Les derniers kilomètres sont d'ailleurs assez éprouvants. Mais cela en vaut vraiment la peine car le champ de dunes est magnifique.

Nous garons la voiture et partons faire l'ascension des dunes, il faut faire vite car le soleil est déjà bas sur l'horizon et nous devons refaire les 67 km de piste en sens inverse. Nous ne ferons pas l'ascension complète, mais nous grimpons quand même pas mal, au rythme de trois pas en avant et l'équivalent de deux en arrière quand la pente se fait raide ; c'est épuisant  ! En avançant, nous découvrons une végétation très particulière, il y a en effet plusieurs espèces de plantes endémiques qui se sont adaptées à cet environnement pour le moins hostile à la végétation.

Nous avons eu de la chance, car deux jours plus tôt, le vent soufflant très fort, a certainement effacé les traces de pas des touristes et les dunes sont presque immaculées.

En bas des dunes se trouve un camping avec les emplacements les plus grands et les plus isolés que nous ayons jamais vus. Nous nous disons que ce serait formidable de passer quelques jours et quelques nuits ici à condition bien sûr d'avoir des réserves d'eau suffisantes car il n'y en a pas dans le camping.

Nous rentrons à la nuit tombante, ravis de ce nouveau périple et conscients d'avoir vu quelque chose d'exceptionnel. Ce qui frappe surtout en allant là bas, c'est l'immensité du parc ; on réalise qu'il doit y avoir bien des canyons et bien des vallées cachées, hors de portée de la plupart des visiteurs.






























  • Toutes nos photos d'Eureka Sand Dune sont visibles ici

dimanche 8 février 2015

Retour à Death Valley - Racetrack Playa

Racetrack Playa est cet endroit extraordinaire où des pierres pesant plusieurs dizaines de kilogrammes se déplacent apparemment toutes seules - ou du moins sans intervention humaine - en laissant des traces bien visibles dans le sol. Le site se trouve dans la partie nord du parc de "Death Valley" non loin du camping de Mesquite Spring dans lequel nous avions planté notre tente.

Avant de nous aventurer là bas, nous nous étions renseigné auprès d'un "ranger" du parc afin de connaître l'état de la piste longue de 45 km qu'il fallait emprunter. Son avis fut sans appel : "n'y allez pas avec votre voiture, vous allez la détruire...". Une affiche dans le camping mettait également les gens en garde sur le risque de déchirure des pneus et de destruction de la transmission ! Bref, pas très engageant tout ça... Nous avons donc décidé de ne pas prendre de risques et de louer une Jeep à Furnace Creek qui se trouve à l'autre extrémité du parc. En gros, c'est à peu près comme si en campant à Annecy, on allait louer une voiture à Grenoble afin de visiter Chamonix et le tout dans la journée bien entendu ! Ce n'est pas donné (environ 300$ la journée), mais les gens de cette entreprise familiale sont plutôt sympas, les voitures sont en excellents états et une balise de localisation par satellite est même fournie en cas de problème (je préfère ne pas penser au coût du dépannage quand on déclenche la balise...)

Nous voilà donc au volant de notre belle Jeep Wrangler, en route pour Racetrack Playa. Après 80 km de route, nous attaquons la fameuse piste qui se révèle en fait pas si terrible que cela, nous aurions certainement pu la faire avec notre voiture, mais il est vrai que le fait d'être dans un vrai 4x4 costaud permet de ne pas se poser de question et de parcourir les 45 km de piste en 1h30 environ. Le vrai risque est lié aux bordures de la piste pleines de pierres bien aiguisées qui ne demandent qu'à lacérer les pneus; il faut donc rester loin des bords et faire super attention en se serrant pour croiser les autres véhicules (heureusement assez peu nombreux).


Teakettle Junction
La piste s'enfonce dans la montagne, avec un passage somptueux au milieux de Joshua Trees. On arrive ensuite à Teakettle Junction, c'est à dire littéralement : "le croisement des bouilloires" ! Et en effet, le panneau indicateur en bois est orné de quelques dizaines de bouilloires. Nous ne connaissons pas l'origine de cette tradition, mais c'est en tout cas pour le moins original. Sur l'une des bouilloires, figurait un message demandant aux visiteurs de passage de se prendre en photo devant le panneau et d'envoyer celle-ci à une adresse mail. Nous avons joué le jeu et peu après, nous avons reçu en retour une photo de la part des propriétaires de la bouilloire qui habitent à Saint Pétersbourg. Autre détail amusant sur ce lieu; c'est l'un des seuls endroits du nord de la Vallée de la Mort où le téléphone cellulaire passe, il y a même de la 4G ! Pourquoi ici ? Mystère... Nous avons donc pu en profiter pour envoyer quelques messages aux enfants.

Grandstand depuis le chemin qui mène à Ubehebe Peak
Encore quelques kilomètres et on arrive en vue de Racetrack Playa. La vue est saisissante, la "playa" est le fond d'un lac asséché, parfaitement plat (il n'y a que 4 cm de dénivelé entre les deux extrémités distantes de 4.5 km), de couleur ocre uniforme et avec une île rocheuse nommée "Grandstand" (la tribune) qui se dresse comme une sorte de vaisseau figé dans la boue. Le paysage évoquait le film "Dune" à Patricia. On a effectivement l'impression d'être dans un décor de science-fiction. Lorsqu'elle est sèche, on peut marcher sur la Playa et grimper entre les rochers de Grandstand. Quelques idiots n'ont pu s'empêcher de laisser des traces en marchant alors que la boue n'était pas sèche, c'est dommage car par ailleurs, le sol est immaculé, sans une seule trace de végétation, on ne distingue que les motifs géométriques formés par la boue séchée.

Vers Grandstand, c'est à dire au nord de la Playa, il n'y a pas de traces visibles de pierres qui bougent, il faut reprendre la Jeep afin de rejoindre la partie sud.

Celui-ci doit bien faire dans les 30-40 kg
L’œil est tout de suite attiré par ces grosses pierres isolées sur la Playa dont on se demande comment elles ont pu arriver là. En s'approchant on constate qu'elles ont laissé une traces bien marquée dans la boue. Certaines ont visiblement changé de direction, parfois la trace forme un angle à 90 degrés. Certaines pierre se déplacent de conserve comme en témoignent les traces parallèles, d'autres se croisent... c'est très étonnant à voir et on se demande bien quel mécanisme peut mettre en mouvement des rochers aussi lourds et souvent bien calés dans le sol.

L'un des éboulis qui alimentent la Playa en pierres
Le plus étonnant est peu-être que ce phénomène, bien que connu depuis fort longtemps, n'a été clairement photographié et mesuré que lors de l'hiver 2013-2014. Des pierres préalablement équipées de puces GPS et filmées se sont mises en mouvement quand toutes les conditions météo (température, humidité et vent) ont été réunies, permettant ainsi d'analyser le phénomène. Si je comprends, bien c'est la poussée de fines plaques de glace qui provoque le déplacement des pierres sous l'effet du vent et alors que la Playa inondée et gelée commence à fondre. Quand les conditions sont bonnes, une légère brise suffit pour mettre les pierres en mouvement. Les pierres elles-mêmes proviennent de quelques éboulis situés au sud de la Playa.

Avant de reprendre la piste en sens inverse, nous avons emprunté le sentier qui monte vers Ubehebe (prononcer you-bi-hi-bi) Peak afin d'admirer le site dans son ensemble. Sur le chemin du retour nous avons encore fait une courte randonnée vers les anciennes mines de plomb de Ubehebe avant de devoir à regret, reprendre la Jeep à la nuit tombante.

Racetrack Playa au soleil couchant
  • Toutes nos photos de Racetrack playa sont visible ici
  • L'article publié dans PLOS ONE sur le déplacement des pierres peut-être consulté ici



mercredi 28 janvier 2015

Retour à Death Valley - Scotty's Castle

Vous l'aurez peut-être remarqué, nous aimons beaucoup le désert. Du coup, nous avons décidé, comme l'an dernier, d'aller passer la période autour du nouvel an dans la Vallée de la Mort. La dernière fois nous avions campé à côté Furnace Creek au sud de la vallée, c'est à dire dans la partie la plus touristique (Bad Water, Zabriskie point, etc...). Cette fois, nous voulions visiter la partie nord où Patricia avait repéré un certain nombre de sites très tentants. Pas trop de choix pour le camping dans cette partie de la vallée, Mesquite Spring est le seul dans cette région qui propose des points d'eau. Comme toujours, ce type de camping correspond exactement à ce que nous recherchons : grand emplacement avec une table et un feu de camp ("fire pit"), le tout dans un décor naturel somptueux. Par contre il faut savoir qu'il peut faire froid dans la Vallée de la Mort en hiver, la température au camping n'est jamais montée au dessus de 6 degrés et il a gelé pratiquement toutes les nuits, mais nous sommes bien équipés. Le problème a vraiment été le vent durant deux jours !

Scotty's Castle
San Francisco - Mesquite Spring, c'est près de 900 km de route soit 9h, et étant donné qu'il fait nuit à 17h30 fin décembre, nous avons choisi de faire escale dans un motel à Ridgecrest, afin d'arriver en tout début d'après midi au camping. Une fois installé nous avons filé visiter Scotty's Castle, situé à quelques kilomètres de là. L'histoire de ce lieu et surtout des personnes qui s'y rattachent est des plus fascinante. Walter E. Scott était un original, mythomane, qui avait réussi à convaincre des investisseurs de financer ses mines situées au fin fond la Vallée de la Mort. 
Scotty's Castle, une oasis dans le désert
Bien évidemment les investisseurs ne voyaient jamais la couleur de l'or, Scotty inventaient toutes sortes d'histoire et se livrait même à des mises en scène afin de se couvrir. Bien entendu le pot aux roses finit par être découvert, mais contre toute attente, l'un des financiers, Albert Mussey Johnson se prit d'amitié pour Scotty qui vraisemblablement l'amusait et lui faisait vivre des aventures par procuration. Il tomba également amoureux de la Vallée de la Mort, acquit un terrain près d'une source et fit construire une somptueuse maison qu'il ne cessa avec son épouse d'embellir et d'agrandir. Le résultat est vraiment splendide, à l'opposé de Hearst Castle, demeure d'un mégalomane fortuné (le Citizen Kane d'Orson Welles) qui cherchait à en mettre plein la vue à ses invités et à ses maîtresses. Au contraire Scotty's Castle semble être la demeure d'un couple qui cherchaient surtout à être bien installé, dans un bel endroit et au milieu d'objets de collection. La crise passa par là, la vie devint plus difficile et la maison ne fut jamais finie, mais Albert Johnson ne laissa jamais tombé Scotty, ni sa femme et son fils à qui il versa une pension car Scotty était bien incapable de subvenir à leurs besoins.

Toutes les photos de Scotty's Castle sont visibles ici.